Y’a pas très longtemps j’ai fait une visite virtuelle d’une clinique virtuelle née de mon imagination. Une clinique psychiatrique où je rendais visite à Petit Ours Brun, mon vieux pote Petit Ours Brun. Le pauvre avait perdu au moins 30 bons kilos.
On s’est assis pour discuter un peu et des amis à lui, rencontrés sur place nous ont vite rejoints : Mickey, la souris toxicomane, Tchoupi le singe anorexique, Babar l’éléphant dépressif. Les Bisounours n’étaient pas loin, les yeux dans le vague et sous perf’ d’anxiolytiques. Tous très sympas, juste tristes et clairement déprimés.
– Quand même Petit Ours, vous faites peine à voir toi et tes potes. Vous avez perdu votre prestige en fait…
– M’en parle pas ! On n’est pas là pour rien. C’est à cause du boulot, c’est plus comme avant. On galère…
– Attends, avec tous vos bouquins, vos séries, vos DVD ?
– Et ouais… Les gamins nous sollicitent moins. A cause des parents. Ils ont la mémoire courte ceux-là. Ils veulent plus acheter nos bouquins et nos produits dérivés. Ils nous trouvent « cul-cul », stupides. D’après eux, on stimule pas assez les gamins…
Je crois que le pire ça doit être moi. On m’accuse d’être macho, tout ça parce que mon éditeur a sorti un tas de bouquins avec ma femme qui fait la bouffe, qui fait le lit, qui range la maison. Je véhicule une image dégradante de la femme a priori.
– Han, mon pauvre, ça doit pas être facile-facile… Et ces deux filles là, qui c’est ?
– Les ptites nouvelles, Dora et Kitty. Elles ont eu une ascension fulgurante, on se les arrachait. Et puis certains parents les ont descendues en flèche. Trop cul-cul elles aussi. Alors que les gosses les adorent.
Mais tu comprends, les parents aujourd’hui, il veulent de l’éducatif, du super-intelligent. Il faut qu’on amuse les petits et en plus qu’on leur apprenne un tas de trucs ! De l’éveil, du jeux, il faut être polyvalent…Il faut pas porter de mauvais message, faut faire attention à tout avec les nouveaux parents !
Bon, trêve de plaisanterie. Cette petite simulation reflète assez mon état d’esprit du moment. Je n’arrive pas à comprendre en fait. Qu’on les trouve complètement neuneu ses ours, singe, fillette, chat, ça, je le comprends. Après tout, cet idiot de Franklin ne sait toujours pas lacer ses chaussures… alors qu’il n’en porte pas ! De mes yeux de 30 ans, évidemment, que ces trucs seront toujours un peu niais. Mais, à la bibliothèque avec mon fils autrefois, je regardais à peine ce qu’il choisissait d’emprunter. Juste, fallait pas que ce soit pornographique quand même, ou violent.
Je lis, j’entends, je vois de plus en plus de mamans (et de papas !) sélectifs et, ce n’est que mon avis, snobs (c’est dit), quant au choix de certains livres / jouets / mythes à destinations des enfants et je parle bien évidemment des tout-petits. Parce que, que tu le veuilles ou non, ton gamin, il y viendra à Dragon Ball et aux supers-guerriers qui tranchent les gentils en 2 ou les absorbent avec leur queue. J’ai longtemps cru que le Haricot resterait à vie abonné à Papoum… mais non.
Je discutais il n’y a pas très longtemps avec une copine dont le fils a 4 mois de moins que ma fille. Après s’être un peu fritées sur le sujet épineux de « Youpala, oui ou non ? » (un classique), elle s’est étonnée de ma dernière acquisition livresque en brocante : des petits livres en tissus Petit Ours Brun (cro meugnon…). Ma fille, qui considère tous les animaux comme des chats, s’est mise à miauler d’enthousiasme en les voyant ! Hop, ils étaient à nous pour un euro !
– Ouais, mais Petit OUrs Brun c’est quand même le summum du bouquin sexiste, quoi. Et alors, c’est d’un cul-cul. J’achèterai jamais ça ! PAR CONTRE, je te recommande cette série des éditions Proutmouche. Chaque livre apporte un savoir nouveau à l’enfant qui blablablablabla…
J’avoue que j’ai décroché. A vrai dire, je m’en fous. Que tel ou tel héros des petits soit cul-cul, niais, que sa femme fasse tout le boulot à la maison comme cette pauvre Maman Ours… je m’en fous.
Ce n’est qu’un ours bordel !
Alors, comprenons-nous bien, je suis la première à m’extasier sur un bel album, de jolies illustrations, un jouet éducatif. Il est bien évident que certains livres éveillent bien plus les enfants que d’autres et qu’il existe de réelles différences de qualités de contenus (comme dans tout). Il y a encore peu de temps, mon amie Perlipo et moi partagions notre enthousiasme pour une collection de petits livres tout simples et qui, sans prétention, avaient une approche assez montessorienne.
Mais, (car il y a un mais), je me contrefous de savoir si les Playmobils sont sexistes, si Minnie est niaise ou si Dora n’apprend rien aux enfants (à part comment se rendre à l’Arbre à Cacao – hum). Et je m’en tamponne le coquillard si Kitty n’a pas de bouche (elle miaulera moins que mon chat) ou si elle est connotée ‘nunuche ». Si ma fille veut une Kitty, elle l’aura (merde).
L’âge d’avoir précisément ce dont on a envie passe trop vite…
L’âge de faire exactement ce qu’on veut aussi. Il arrivera vite le moment où mes petits seront entourés de bêtes savantes qui critiqueront ce qu’il faut regarder à la télé ou pas (d’ailleurs, la télé, c’est le mal non ?) et que « si tu regardes ça c’est que t’as pas de culture, en revanche, si tu regardes ça, c’est bien ! » (comment ça me gonfle ça aussi…).
Ce sont des ENFANTS, mes enfants (comme les tiens en fait). Mon avis ? Tout le monde devrait péter un bon coup et arrêter de taper des thèses de 10 pages sur des dessins animés.
Voilà. Ca fait du bien.
Dans un prochain numéro de « Nanette fait sa crise », je parlerai de mon ras le bol des livres sur la parentalité, puis j’évoquerai, bien sûr, cette espèce d’obsession d’aimer forcément de la musique ou des bouquins que personne ne connaît (vive le commercial.)
Bien cordialement et belle journée !