Souviens-toi, hier je te racontais comment, enceinte de 5 mois, j’ai repris ma voiture mercredi soir après la méga tempête de neige… On y va pour la suite, où tu découvriras que les Humeurs de Nanette, c’est aussi les conneries qu’elle fait !

Il est 18h00 quand j’arrive enfin à ma voiture. Je démarre, le moteur de la 106 ronronne gentiment. Impossible de quitter mon stationnement, mes roues patinent, il y a de la neige derrière chacune d’elles !

Je descends et j’essaie de me baisser pour enlever la neige (dégueu) toute noire. Le gentil monsieur chinois vient à ma rescousse. A deux, c’est vite fait ! J’appelle quand même Monsieur Nanou pour lui dire que je rentre en voiture. Erreur, grosse erreur.

Réflexions sympas sur le fait que je n’aurais pas dû y aller et surtout pas en voiture. Que j’aurais dû prévoir vu qu’on parle de cette foutue neige depuis ce matin. J’encaisse et je ne dis rien. Il ne perd rien pour attendre. C’est pas demain qu’il goûtera la tatin salée de bbflo !

Je descends la rue sans difficulté, la neige a bien fondu, ça ne glisse pas. Je suis en pétard après mon mari, mais je triomphe. Dans une heure, il sera bluffé !

Première intersection, premières scènes de chaos total. Des voitures partout, des camionnettes de travers…au milieu de la route. Je ne peux plus suivre le GPS, je suis obligée de me dérouter pour éviter la gigantesque plaque de verglas.

Je prends une rue perpendiculaire et roule en cul-à-cul pendant 20 minutes. Je ne sais plus du tout où je suis et je fais nettement moins la fière quand le GPS me tanne pour que je me remette dans le droit chemin (= le bordel et la plaque de verglas). « Faites demi-tour dès que possible »…

Je tourne longtemps, d’axes principaux en petites rues… J’ai très envie de faire pipi, de pleurer et de gifler un policier. Mais le souci est là : il n’y a AUCUN policier dans les rues.

A 18h40, je débouche sur un rond-point et je vois un ange, un bel ange doré perché sur une poutre verte. C’est un signe ! C’est un très mauvais signe. Je connais cet ange, je l’ai vu des dizaines de fois, parfois l’esprit embrumé par les vapeurs de mojito ou les oreilles bourdonnantes de la salsa du « Bario Latino ». Je suis Place de la Bastille. Je veux mourir. Je déteste cette place presque autant que la place de  l’Etoile ou République. Un enfer en voiture, rien de pire. Sauf aujourd’hui. C’est l’apocalypse (je sais, j’en fais trop). Les voitures sont dans tous les sens, personne ne peut passer. Deux agents de circulation (enfin !) font des moulinets avec les bras et jouent du sifflet. Tout le monde s’en fout, passe, repasse et dépasse. C’est la cohue !

J’ai peur, mais je m’y engage. Une fois dedans, je pourrai téléphoner.

Une fois dans la place, deux messieurs très éméchés me balancent des boules de neige sur la voiture. Je ne râle pas, trop peur de m’en prendre une.

Je rappelle mon gentil mari (je fais profil bas) pour lui demander une solution. Je me mets à pleurer dès que j’entends sa voix. Je lui explique vite la situation : l’ange doré, la place, les deux flics, la peur et dis-moi vite quoi faire, j’en peux plus !

– Mais qu’est-ce que tu fais à Bastille ?? C’est pas ta route du tout ! Tu fais un détour là… Bon, écoute, tu vas prendre les quais, ok ?

– Ok chéri, mais y’a pas de panneau qui indique les quais, c’est normal ? Quel quai d’abord ?

 

Il rigole. Il RIGOLE. Je ne veux plus mourir, je veux divorcer. Il répète en ricanant « un panneau qui indique les quais, gniark gniark gniark ! » Qu’est-ce que j’ai pu trouver à cet homme hein, tu peux me dire ? Il se fout de mon innocence banlieusarde face à la jungle parisienne ! Je crie un peu fort parce qu’il se calme et m’indique une direction à droite. Je raccroche, verte de rage. Je vais divorcer en rentrant, c’est sûr !

A « droite », ça m’a l’air bouché, tant pis, j’y vais quand même ! DAMNED. Les quais sont fermés. Je jette un oeil vite fait : en fait les quais se sont transformés en parking géant Les voitures sont coincées et certaines sont très mal en point : la neige a gonflé le niveau de la Seine. La Seine a très envie de déborder sur les quais, rapport au fait qu’elle aime pas trop qu’on la remplisse pendant quatre heures sans rien lui demander. Je ne suis pas sur les quais, merci Sainte Rita.

Je me déroute, encore. Je vais sur la gauche. Je suis très énervée et en plus je me fais chier. J’allume la radio pour capter France Bleu Ile de France. Mauvaise idée : j’ai droit en direct aux témoignages des Franciliens sur la route dans la merde neige. 492 kilomètres de bouchons, record, N118 blindée. J’apprends que j’ai bien fait de ne pas prendre le RER C, la ligne est interrompue pour aller chez moi. J’apprends que la voiture c’est pas mieux, l’A6 est blindée aussi. Je ne veux rien savoir du périph’, sinon je vais encore pleurer.

Quelle route suivre ? Je ne peux plus écouter le GPS…

Un panneau « Gare de Lyon »… Je suis déjà allée à la Gare de Lyonen voiture, y’a un an ! Donc je connais, donc je peux rentrer de là-bas. La Gare de Lyon est mon nouvel eldorado après ma déception des quais. C’est re-la galèrepour y arriver. Et j’ai envie de fairepipi. Dans quelques temps, ça sera le sac en plastique ou pisser dans la bagnole. Comment est-ce que je suis rentrée de Gare de Lyon…? Par la Place d’Italie ! Il y a le périph’ là-bas ! Qui dit périph’, dit A6… maison !

Ça fait plus d’une heureque je suis partie… J’ai perdu mon pari. L’horloge de la Gare de Lyon me regarde en souriant. Elle est loin, très loin. Un motard me fait un signe. Je baisse ma vitreet il me dit de ne pas aller plus loin, qu’il y a un gros blocage direction Gare de Lyon, plus personne ne peut avancer. Je suis désespérée, je ne peux que tourner sur ma droite : Gare d’Austerlitz. Je crois me souvenir qu’elle est à côté de la Gare de Lyon.

Que dire de plus à part que c’est le bordel ? C’est le gros bordel ! Je n’ai jamais vu ça, les gens deviennent fous pour couronner le tout. Un type en 4×4 me klaxonne. Il klaxonne, j’y crois pas ! Il me fait des signes pas choupi du tout, je le vois dans mon rétroviseur ! Je monte tout doucement en pression. Ça m’énerve. Çam’énerve beaucoup. Quand je suis très énervée, je fais n’importe quoi. Je descends de voiture par exemple. Sans manteau, sans gilet, juste avec mon gros ventre. J’ai l’air d’une hystérique en cloque. Je tape à sa vitre !

– T’as fini de klaxonner comme un con là ? On est tous dans la merde, on va tous rentrer à pas d’heure ! Allume ta radio, y’a 400 bornes de bouchon en Ile de France ! Plus la bagnole est grosse, plus ils sont cons, c’est pas possible ! Arrête tes conneries de klaxon et fais comme tout le monde, attends !

Une dame en Kangoome sourit et me dit bravo. Des mecs en camionnette me disent en rigolant qu’ils ne me klaxonneront pas, ils ont trop peur ! Je chiale de rage dans la voiture. Le 4×4 saisit la première occasion pour se mettre à ma gauche et me faire un très gros doigt d’honneur. Je lui envoie un bisou volant. Des fois, je suis un peu garce quand même ! J’ai plein d’amis tout à coup sur cette route parisienne !

Ne le dis pas, je sais que j’ai frôlé la baffe dans la gueule…

Encore un rond-point, un pont, et à gauche il y a la direction du périphérique. C’est pas gagné, c’est long, épuisant, mais j’y suis !

Plus de neige mais alors quel verglas ! Je joue du volant pour ne pas déraper. C’est Holiday on Ice mais en 106 kid !

Il est 21h00 quand j’atteins enfin MON autoroute, mon A6 adorée… C’est devenu un immense hôpital pour camions échoués (interdiction de circulation à cause de la neige, ils ont été obligés de s’arrêter sur place) mais, mais…

ÇA ROULE ! Ça roule même assez bien, genre40/50 km/h (quand tu passes 3h30 à 2 à l’heure, c’est presque jouissif !)… La sortie, quelques dérapages sur les routes pavillonaires aux abords de chez moi… et j’y suis !

21h50 : A la maison, Monsieur Nanou fait du boudin. Ok. J’ai besoin de chaleur et d’un peu de réconfort. Je pourrais appeler ma mère (GROSSE BLAGUE !) ?

Je préfère prévenir les Follasses que je suis saine et sauve et la Fève aussi. Prendre des nouvelles aussi. Mentalo est toujours sur la route (il lui reste 50 km), As de Trèflea galéré dans Paris aussi, Cranemou est bien rentrée (les trains sont plus civilisés que les bagnoles !)… Les autres vont bien, elles se sont inquiétées pour moi et je me fais gentiment gronder.

 

C’est ça dont j’avais besoin : « je me suis inquiétée pour toi ». Mari Grognon attendra quelques heures pour le dire enfin…

Et toi, t’étais où pendant la cohue ?