Dans 10 jours, j’habillerai mon bébé de bon matin. Je n’aurai pas à presser mon grand molasson de Haricot pour qu’il s’habille en vitesse, il sera en vacances chez son père.

Dans 10 jours, je la ferai toute belle ma fille, ce sera la première fois que tu la verras.

Je serai fébrile, excitée, émue avant l’heure. Je boirai une tisane, comptant sur son effet placebo « décontractant ». Il faudra que je me calme, j’aurai un peu de route à faire.

Dans 10 jours, je débarrasserai le coffre de la 106 de tout le bazar qui s’y trouve : poussette, sacs, mini-jerrycan (vestige d’une panne d’essence en 2009)… J’y ferai de la place pour ta valise et celle de ton fils.

Dans 10 jours, harnacherai ma fille dans la voiture. On prendra la route toutes les deux. L’A6, puis l’A86, mes autoroutes familières.

Comme à chaque fois que tu viens, c’est en voyant les panneaux à fond jaune, synonymes d’aéroport, que mon coeur commencera à battre un peu plus fort.

Orly Sud, Orly Ouest…? Quel terminal déjà ? P1, P2, P3 ? Où donc vais-je garer la voiture ? Surtout, retenir le numéro du parking, le numéro de l’allée…

Dans 10 jours, je vais repérer le hall des arrivées. Ça grouillera de monde à Orly. Comme toujours. J’aurai une chance sur deux en arrivant devant les écrans d’information : « A l’heure – On time » ou « Late – Retardé ». Comme toujours.

Alors, j’attendrai. Je t’attendrai. Je bercerai ma fille qui déteste la foule et le bruit. Peut-être s’endormira-t-elle dans son écharpe.

Et enfin, le vol en provenance de Pointe-à-Pitre sera annoncé. Dans la file d’attente, comme toujours, il y aura une foule de toutes les couleurs, mais beaucoup de marron tout de même ! Ça parlera créole dans tous les sens. Il y aura des cris, des « Hééééé !!! », des chariots plein de valises, colis, glacières pleines à craquées de délices de là-bas…

Et je vous verrai. Je me refuse à t’imaginer, je sais que tu as beaucoup maigri ma Nanny. Tu étais déjà bien fine, la tristesse, le deuil, la solitude ont fait le reste. Je verrai ton petit koala, qui aura tellement grandi depuis mon mariage.

Et les larmes monteront toutes seules.

Dans 10 jours, je pourrai enfin, ENFIN, refermer mes bras sur toi et pleurer avec toi. Sans téléphone, sans ces 7000 kilomètres entre nous deux.

Les fêtes de Noël auront peut-être un goût amer, mais tu seras avec nous, ta famille.

Dans 10 jours, nous serons réunies. Ce sera un peu comme avant. Toi la timide, et moi le bout-en-train. Peut-être que je pourrai enfin te rendre tout ce que tu m’as donné dans la vie. Te rendre tout ce que tu m’as appris, toi qui m’a si souvent servi de maman.

Dans 10 jours, le petit bout de moi qui vit outre-mer me rejoindra enfin.